L’immigration, indispensable pour la croissance française, vraiment ?

Photo - Pierre Vermeren. Capture d'écran YouTube 2020 02 05 Conférence EdG. La Cohésion de la France.

L’immigration, indispensable pour la croissance française, vraiment ?

Dans un long entretien au Figaro, dont voici quelques extraits, Pierre Vermeren, agrégé et docteur en histoire, pointe le fait de considérer le faible taux de fécondité comme inéluctable et l’immigration comme indispensable. Une vision purement statistique du peuple français, selon lui.

Or, « Les pouvoirs publics ont un rôle à jouer, tant pour promouvoir une politique nataliste que pour contrôler l’immigration ou repenser notre modèle de croissance économique », insiste-t-il.

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L’historien fustige notamment une récente note de l’Institut Montaigne, consacrée à la démographie de la France, qui ose affirmer : “La France s’apprête à connaître un déclin de sa population que seule l’immigration pourrait combler à court et moyen terme.” Et encore : “Dans les premières décennies du siècle, sa population ne croîtra sans doute que par l’immigration. (…) Celle-ci a atteint un niveau inédit en 2022.”

L’étude « pointe l’inéluctabilité du vieillissement démographique ; la cohorte des baby-boomeurs en est la cause, jusqu’à son “extinction” vers 2060. (...). Du fait que la France compte selon l’Insee 19 millions d’habitants liés à l’immigration - sur trois générations -, la note annonce (...) la mise en minorité du peuple historique français sur son sol vers 2070. »

« Mais, de cela, le rapport ne dit mot, déplore Pierre Vermeren, il invisibilise les hommes et les femmes, ce que l’on appelait la population (...), ne traitant que de courbes, de flux, de pourcentages et de stocks. Du point de vue épistémologique, cette note est un chef-d’œuvre de l’économisme contemporain, qui a absorbé la démographie, cette “science des peuples” (démos), ravalés au rang de facteur de production parmi d’autres. »

Tous ces calculs faits de courbes et d’hypothèses cachent des interrogations bien plus essentielles, souligne encore M. Vermeren : « Pourquoi la jeune génération de Français procrée de moins en moins par rapport à la précédente (...) ? Pourquoi un nombre inédit et croissant de jeunes Français, 200.000 par an dont seulement un sur deux reviendra, quitte ce pays ? »

Cette note dévoile également une intention : « Plus les Français vieillissent ou partent, et moins ils font d’enfants, plus il faut accroître le flux migratoire entrant. »

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Or, souligne le normalien, « L’homme et sa société sont impensés par la note. Une élite s’adresse à ses homologues, comme si le modèle présenté allait de soi. Or, celui-ci n’a pas d’équivalent hors de l’Amérique du Nord et de l’Europe du Nord-Ouest. Seuls nos pays comptent sur l’immigration de masse, dans un monde dont la population va décliner plus vite que prévu dès 2050. (...) L’avenir et les choix politiques offerts aux Français ne sont pas posés. Pourquoi faire perdurer ce modèle quarantenaire quand près des trois quarts des Français le rejettent ? »

Face aux carences liées à la perte de croissance, « la note évoque la nécessité d’une immigration assumée. Elle en souligne la neutralité budgétaire (“impact fiscal faible”), ce que contredisent d’autres analystes. Elle soutient le fait que les immigrés, qui sont jeunes, travaillent plus que les autres ; mais elle pointe en même temps le sous-emploi des ressortissants africains (taux d’emploi de 38 % contre 70 % chez les personnes sans ascendance migratoire). Elle dénie la principale fonction économique des immigrants nouveaux : consommer. Et souligne le faible impact de l’immigration sur le marché du travail et le niveau des salaires. »

Un autre point est dénoncé par M. Vermeren : pour lui, les pouvoirs publics « (...) ont déstabilisé le modèle familial français par les politiques sociétales conduites depuis des décennies, d’où la flambée des familles monoparentales, et ce que Sylviane Agacinski a qualifié le “corps en miettes” ; or un corps en miettes ne se reproduit pas. Les pouvoirs publics encouragent en outre un millénarisme climatique (l’écoanxiété promue par l’école), qui incite les jeunes Français à ne pas se reproduire pour “préserver la planète” ».

« Il y a quelque ironie de ce fait à remplacer les non-naissances par des immigrants venus du Sud, ce qui multiplie par huit leur empreinte carbone du fait de passer d’une région à l’autre. Quelle cohérence préside ces choix ? », s’interroge-t-il à juste titre.

Pourtant, « Favoriser la natalité par des politiques proactives demeure une option qui correspond aux attentes de nombreux Français qui limitent leur famille faute de moyens », rappelle Pierre Vermeren.

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Enfin, « La note estime enfin que le ratio actifs/plus de 65 ans va s’aggraver à l’avenir. Mais ce “ratio de dépendance démographique occulte l’angle mort de près de 10 millions d’actifs potentiels inemployés. Leur absence rend l’équation intenable. Faut-il une “immigration massive” pour y remédier, ou bien s’attaquer à ce nœud qui concerne natifs et immigrés ? », interroge encore l’historien.

« C’est l’objet du débat politique, économique et démocratique offert aux Français. La démographie migratoire n’occultera pas nos deux problèmes de fond: la France ne sortira pas de ses maux économiques et financiers sans une extension déterminée de sa base industrielle et productive ; quant à sa population, n’est-elle qu’un simple agrégat économique que l’on doit faire croître par tous moyens, ou un peuple politique doté d’un libre arbitre, et d’une culture que l’on doit respecter ? », conclut-il.

Source : https://www.lefigaro.fr/vox/societe/pourquoi-l-immigration-n-est-pas-la-solution-pour-enrayer-le-declin-demographique-francais-20230905

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