Notre-Dame : « le délire postmoderne continue et s’attaque à l’intérieur »

Notre-Dame : « le délire postmoderne continue et s’attaque à l’intérieur »

Dans un entretien récent au Figaro, le directeur de La Tribune de l’art et également historien de l’art français, Didier Rykner, fustige le projet de l’archevêché de Paris qui envisage d’éradiquer l'héritage de Viollet-le-Duc à l’intérieur de Notre-Dame et d’instaurer un mobilier et des vitraux contemporains !

Une « démarche inquiétante », un projet « scandaleux et inacceptable », dénonce-t-il.
« J’enquête moi-même depuis plusieurs semaines sur ce projet de l’archevêché, explique le spécialisté de l’art. (…) On va me répondre qu’il ne s’agit là que d’un projet et qu’on peut discuter de tout. Et bien non, car dès le départ le cahier des charges impose qu’on ne touche pas à un patrimoine protégé. Le fait de vouloir remplacer certains vitraux décoratifs du XIXème siècle par des vitraux contemporains est inenvisageable. »

De plus, « (…) il s’agirait de remplacer des vitraux existants, qui ont été miraculeusement épargnés par l’incendie. En vérité on veut se livrer par préjugé à l’éradication de l’héritage de Viollet-le Duc. La flèche a heureusement été sauvée, mais le délire postmoderne continue et s’attaque à l’intérieur », déplore-t-il.

M. Rykner explique pourquoi l’église elle-même cède à la tentation du contemporain : « Le clergé français a dans les années 1960 interprété le concile Vatican II en mettant en œuvre un vandalisme inédit depuis la révolution française au nom d’un modernisme douteux. C’est ainsi qu’il s’est débarrassé de chaires, de maitres-autels de tables de communions innombrables. C’est tout un patrimoine qui a disparu, et ça continue. »

« On peut admettre que l’arrangement de Notre Dame avant l’incendie était un peu erratique, avec de nombreuses chapelles fermées, mal éclairées, et une circulation difficile. Que les travaux de rénovation soient l’occasion d’un nouveau départ, cela se conçoit », concède le journaliste.

« Mais n’oublions pas que tout ce patrimoine (mobilier, tableaux, vitraux) est protégé d’un point de vue légal. Et que la souscription levée pour les travaux l’a été fait pour la restauration, et pas pour l’innovation: elle ne saurait être utilisée pour installer du mobilier contemporain. »

« Une cathédrale gothique est un ensemble à l’architecture spécifique, il faut faire avec l’histoire », rappelle-t-il à juste titre.

« Si Monseigneur Aupetit veut la guerre avec les défenseurs du patrimoine, il l’aura. La sagesse voudrait qu’il y renonce, ou que le ministère de la Culture sonne la fin de la partie », conclut le directeur de La Tribune de l’art, dans un autre article publié sur son site.

Quel paradoxe insensé : que l’Eglise torpille elle-même son héritage et que ce soit l’Etat qui doit venir au secours du patrimoine religieux….

Nathalie Burckhardt

Source : https://www.lefigaro.fr/vox/culture/didier-rykner-remplacer-les-vitraux-de-notre-dame-par-du-contemporain-serait-du-vandalisme-20201120

Photo: Notre Dame – F. Viotti