Minarets : la goutte d’eau qui fait déborder le vase

Minarets : la goutte d’eau qui fait déborder le vase

Les crispations symboliques entre Islam et Chrétienté sont toujours fortes dans un pays pourtant laïc comme la France, comme le démontre la polémique des minarets. C’est que nous rappelle Jérôme Fourquet dans « A la droite de Dieu », essai publié aux éditions du Cerf, 2018. L’auteur est politologue et directeur du département Opinion et Stratégies d’Entreprise de l'institut de sondages Ifop depuis 2011.

Cette crispation face à l’affirmation de la présence d’un islam de plus en plus visible, et qui viendrait supplanter les traces laissées par des siècles de chrétienté, n’est pas propre à la France. En novembre 2009, un referendum avait ainsi été organisé en Suisse sur l’interdiction de la construction de minarets : 57 % des Suisses votèrent pour l’interdiction des minarets.

Un sondage de l’Ifop réalisé dans la foulée indiquait que 53 % des Français seraient opposés à l’érection de minarets. Même si notre société est sécularisée, l’imaginaire collectif demeure fortement imprégné par le christianisme et ce à un point tel qu’un candidat de gauche, François Mitterrand, n’hésita pas à poser devant le clocher d’un village pour une affiche de campagne restée célèbre. L’architecture religieuse a toujours été un enjeu de pouvoir pour marquer un territoire.

Le dirigeant turc Recep Tayyip Erdogan avait, quant à lui, cité les vers d’un poète islamo-nationaliste qui traduisent bien la dimension géopolitique de l’érection d'édifices religieux : « Les minarets sont nos baïonnettes, les mosquées nos casernes et les croyants nos soldats. »

En mars 2017, dans le cadre de sa campagne pour le référendum qu’il avait organisé et dans un contexte de à la droite de Dieu tensions avec des pays européens (dont l’Allemagne et les Pays-Bas qui s’étaient opposées a` la venue de ministres turcs souhaitant tenir des meetings auprès de leur communauté), le même Recep Tayyip Erdogan envoya un message sur Twitter appelant ses compatriotes vivant en Europe à « faire cinq enfants » pour prendre une revanche sur les injustices et « devenir l’avenir de l’Europe » (nous soulignons). On retrouve bien ici l’idée d’un processus de substitution démographique annoncé et d’une islamisation de l’Europe souhaitée par les uns et redoutée par les autres.

François Py

Photo : Image par Konevi de Pixabay
Source : Atlantico, Jérôme Fourquet, « Clochers contre minarets : la construction d'édifices religieux, une entreprise très politique ».
Pour aller plus loin : « À la droite de Dieu » de Jérôme Fourquet.