Comte-Sponville : « Faire de la santé la valeur suprême, c’est du nihilisme sanitaire »

Comte-Sponville : « Faire de la santé la valeur suprême, c’est du nihilisme sanitaire »

Dans un entretien au journal Le Point, le philosophe André Comte-Sponville s'alarme du « nihilisme sanitaire », qu'il voit prendre toujours plus d’ampleur depuis le début de la pandémie.

Il tire la sonnette d’alarme sur le sort des plus jeunes générations, sacrifiées au nom de la santé, devenue une « valeur suprême » à la faveur de la pandémie.
Dans cet entretien, le philosophe dénonce les dangers du « panmédicalisme », « l’idéologie qui fait de la santé la valeur suprême, et qui tend dès lors à tout soumettre à la médecine ».

Pour André Comte-Sponville, il s’agit là d’une double erreur : la santé « est un bien plutôt qu’une valeur », rappelle-t-il. « Un bien, c’est quelque chose qui est désirable ou enviable. Une valeur, quelque chose qui est estimable ou admirable. Richesse et santé sont des biens. La générosité, le courage ou l’amour sont des valeurs. »

« Quand on sacrifie les valeurs aux biens, on est déjà dans le nihilisme, explique André Comte-Sponville. Faire de la richesse la valeur suprême, c’est du nihilisme financier. Faire de la santé la valeur suprême, c’est du nihilisme sanitaire », accuse-t-il avec raison.

Pour le philosophe, la deuxième erreur consiste à considérer la santé comme le plus grand bien à l’échelle de la société. « Le pays le plus enviable, ce n’est pas forcément celui qui a le meilleur système de santé ! » s’exclame-t-il.

Ainsi, « quand tous nos politiques répètent qu'« il n’y a rien au-dessus de la santé » », le penseur considère qu’il s’agit d’une inquiétante « rupture à la fois philosophique et politique ».

« La mort fait partie de la vie. Comment aimer celle-ci, si on n’accepte pas celle-là ? », interroge M. Comte-Sponville. Dans la même ligne de pensée, il invite à relire Montaigne qui « nous apprend à ne pas sacrifier l’amour de la vie à la peur de la mort ».

« Ce ne sont pas les médecins qui gouvernent ; ce sont nos élus ! À eux de prendre leurs responsabilités, au lieu de se cacher perpétuellement derrière le « comité scientifique » !

« Nous ne sommes pas un peuple de patients ; nous sommes un peuple de citoyens libres ! » conclut-il avec force.

Nathalie Burckhardt

Source : https://www.genethique.org/faire-de-la-sante-la-valeur-supreme-cest-du-nihilisme-sanitaire/

https://www.lepoint.fr/debats/comte-sponville-on-meurt-plus-vite-de-faim-que-de-maladie-25-11-2020-2402531_2.php#

Photo: Capture d’écran YouTube - André COMTE-SPONVILLE dénonce la soumission insupportable face au COVID